La Martinique n’a pas fini de livrer ses secrets. Sous les fondations d’un célèbre Club Med à Sainte-Anne, des archéologues viennent de faire une découverte qui bouscule notre compréhension de la présence amérindienne dans les Caraïbes. Imaginez : 257 vestiges datant de plus de 1 300 ans, enfouis sous le sable et les pierres, refont surface pour éclairer un passé jusqu’ici largement inconnu.
Un site archéologique majeur sous un complexe touristique
Que se cache-t-il sous vos pieds lorsque vous profitez d’un séjour en bord de mer ? En Martinique, la réponse pourrait bien être : une ancienne civilisation. Lors des travaux de rénovation du Club Med des Boucaniers à Sainte-Anne, une équipe d’archéologues a mis au jour un site précolombien vieux de plusieurs siècles.
Le site couvre une surface de près de 6 000 m². Il daterait de la période dite “Saladoïde moyen”, correspondant aux IVe au VIIe siècles. À cette époque, la Martinique abritait une population amérindienne stable, organisée, et visiblement bien implantée sur le territoire.
Une série exceptionnelle de puits amérindiens
Au cœur de cette découverte : 73 puits creusés par les anciens habitants. Ces structures servaient à puiser de l’eau douce dans la nappe phréatique, située à environ 70 centimètres de profondeur. Certains puits atteignent une profondeur de plus de deux mètres.
Pour stabiliser ces points d’eau, les Amérindiens utilisaient une technique ingénieuse. Ils plaçaient dans le fond des vases en céramique percés les uns sur les autres, formant ainsi un cuvelage qui renforçait la structure. Une solution pratique dans une zone sans rivières proches. D’après les experts, c’est la plus grande série de puits de ce type jamais recensée dans les Petites Antilles.
Des sépultures qui racontent des rites anciens
Les archéologues ont également exhumé 14 sépultures. L’une des plus marquantes concerne un enfant âgé de deux ans, enterré avec soin sur un duho, un siège cérémoniel en bois réservé aux personnes importantes. Ce détail laisse penser que même les plus jeunes étaient intégrés aux rites mortuaires.
Chez les adultes, on a retrouvé des restes positionnés de façon contractée, suggérant qu’ils avaient été enveloppés, possiblement dans des hamacs. Les sépultures étaient souvent recouvertes de coquilles de lambis ou de blocs coralliens, des matériaux symboliques dans ces cultures insulaires.
Un pétroglyphe unique : visage gravé dans la pierre
Autre trouvaille étonnante : un pétroglyphe taillé dans un galet pesant vingt kilos. Ce dessin vieille de plusieurs siècles représente un visage humain stylisé, gravé avec soin. Les spécialistes restent prudents sur son interprétation, mais soulignent sa rareté dans la région.
Ce type de pièce est rarement trouvé dans les Antilles, et pourrait bien devenir une référence majeure pour mieux comprendre l’art ancien des populations précolombiennes caribéennes.
Des indices d’une occupation étalée sur plusieurs siècles
En plus de ces objets, les fouilles ont mis au jour des haches et d’autres outils couramment utilisés à cette époque. Certains éléments semblent provenir de périodes différentes, ce qui suggère une occupation du site sur une durée prolongée.
Les chercheurs poursuivent leurs analyses pour mieux cerner la chronologie précise du site. Ces découvertes pourraient remettre en question certains repères établis sur l’histoire précolombienne de l’archipel antillais.
Un trésor archéologique en plein cœur touristique
Découvrir un passé aussi riche sous un hôtel moderne, c’est frappant. Ce contraste soulève des questions passionnantes : combien d’autres sites comme celui-ci restent enfouis, inconnus ? Et comment concilier préservation du patrimoine et développement touristique ?
Cette trouvaille en Martinique constitue une avancée majeure pour la connaissance du peuplement précolombien des Caraïbes. Elle offre un aperçu émouvant d’un peuple disparu, dont les traces résistent au temps, bien cachées sous le sable des plages que nous fréquentons aujourd’hui.
La Martinique n’est pas uniquement une île de plages et de cocotiers. C’est aussi un territoire chargé d’histoire, où chaque grain de sable peut cacher une pièce du puzzle de notre humanité.